Le comité scientifique de l’Autorité Européenne de
Sécurité des Aliments (EFSA) a lancé une consultation publique quant à
la possibilité de substituer le système de test actuel relatif aux
produits chimiques par une dose d’exposition tolérée fixe. Dite « Seuil
de Préoccupation Toxicologique » (SPT) (1), cette dernière s’appuie
ainsi sur la tolérance a priori de quantités fixes définies de
polluants, sans évaluation du risque spécifique. L’EFSA utilise
actuellement l’approche SPT pour évaluer des substances aromatisantes et
des métabolites de pesticides dans les eaux souterraines. Visant
l’ensemble des impuretés chimiques et des métabolites, l’extension
proposée par l’agence a suscité l’indignation de l’association
Générations Futures. Celle-ci qualifie cette approche de « construction
artificielle pour laquelle l'industrie a fait pression à tous les
niveaux dans les 15 dernières années pour garantir l'accès au marché à
un large éventail de produits chimiques ».
Outre son application pour le moins contestable, l’approche SPT se base
sur des données issues d’études très anciennes, voire égarées,
majoritairement parrainées par l’industrie. A l’inverse, les études
scientifiques indépendantes sont mises de côté. Selon Générations
Futures, concernant les produits chimiques perturbateurs du système
endocrinien, des doses 10, 100, 1000, et même jusqu'à 7500 fois plus
faibles que la valeur de la SPT se sont révélées toxiques dans des
études indépendantes. De plus, si cette approche devait être retenue,
l’effet cocktail des divers composés chimiques auxquels est exposée la
population ne serait pas pris en compte. Il en irait de même pour les
catégories de population dites vulnérables, à l’instar des nourrissons
et des enfants. Enfin, l’adoption d’une telle approche pour une certaine
partie de substances chimiques laisse craindre son extension future à
d’autres composés. Selon François Veillerette, porte-parole de
Générations Futures, « Si la SPT était appliquée à la classe la plus
dangereuse de produits chimiques, alors presque tous les pesticides
seraient soudainement classés « sûrs » pour les humains et aucun test ne
serait plus nécessaire ».
Initialement, l’approche SPT est prévue pour fournir une indication du
risque et n’a pas vocation à garantir la sécurité des substances
auxquelles elle s’applique. En revanche, en fixant un niveau élevé
d’exposition, elle permet à divers produits chimiques non testés d’être
mis sur le marché. Elle constitue ainsi un atout précieux pour la
pérennité du lobbying industriel. Pour l’heure, un rapport de synthèse
de la consultation publique en cours sera publié sur le site internet de
l’EFSA, en parallèle avec le texte final, lequel devrait être achevé
d’ici la fin de l’année 2011.